L'Occitanie et le Languedoc
au Moyen-Âge
Occitanie et Languedoc sont deux notions souvent employées comme synonymes. Or, bien qu'elles aient des liens, ces deux notions sont distinctes.
Avant que les termes "Occitanie" et "Languedoc" n'apparaissent, le Midi méditerranéen porte un autre nom : la Septimanie. Cette appellation romaine désigne la province conquise par les Wisigoths au 5ème siècle, s'étendant de Narbonne à Nîmes, du Rhône aux Pyrénées.
Narbonne, capitale de la Septimanie, demeure un centre majeur. Lorsque Charlemagne arrache la région aux Sarrasins (fin 8ème siècle), la Septimanie devient un duché carolingien, puis un ensemble de comtés : Toulouse, Carcassonne, Narbonne, Béziers, Roussillon. Le terme "Septimanie" reste en usage officiel jusqu'au 10ème siècle, désignant essentiellement la bande côtière méditerranéenne.
Le terme "Occitanie" n'existe pas au début du Moyen Âge. Il émerge progressivement au 12ème siècle comme concept géographique et culturel, fondé sur un critère linguistique : l'usage du "oc" pour dire "oui". Le concept d’Occitanie est une notion géographique et culturelle, non politique : il n'y a jamais eu de royaume ou d'État d'Occitanie au Moyen Âge.
L'Occitanie médiévale ne désigne pas une entité politique unifiée, mais un vaste espace culturel et linguistique couvrant le tiers sud de la France actuelle. Du Limousin aux Alpes, du Massif Central à la Méditerranée, cette région se définit avant tout par sa langue commune : la langue d'oc, par opposition à la langue d'oïl parlée au nord de la Loire.
Ce territoire comprend plusieurs ensembles régionaux distincts : le Languedoc, la Provence, le Dauphiné, l'Auvergne, le Limousin, la Gascogne et le comté de Toulouse. Chacun possède ses particularités, mais tous partagent une culture romane, des traditions juridiques issues du droit romain, et une certaine distance vis-à-vis du pouvoir royal capétien basé à Paris.
L'Occitanie médiévale n'est donc pas un pays au sens moderne, mais une civilisation. Elle se caractérise par une remarquable diversité politique : comtés, vicomtés, seigneuries et villes consulaires coexistent dans un système féodal plus souple que dans les régions septentrionales du Royaume de France.
Le Languedoc :
le Cœur Méridional de l’Occitanie
Le Languedoc médiéval constitue la partie centrale de l'espace occitan. Son nom même, apparu progressivement, signifie "pays de langue d'oc". Cette région s'étend approximativement de Toulouse à Nîmes, des contreforts pyrénéens à la vallée du Rhône.
Le Languedoc se structure autour de plusieurs pôles urbains majeurs. Toulouse, capitale du puissant comté du même nom, rayonne comme centre politique et culturel. Montpellier, Nîmes, Béziers, Carcassonne et Narbonne forment un réseau de villes prospères, enrichies par le commerce méditerranéen et l'agriculture. Ces cités développent des institutions communales avancées, les consulats, où les bourgeois participent au gouvernement urbain.
La société languedocienne se distingue par son ouverture. Les communautés juives s'épanouissent, notamment à Narbonne et Montpellier, contribuant à la vie intellectuelle et économique. Le catharisme, mouvement religieux dissident, trouve un écho favorable parmi la noblesse et la population du 12ème siècle, signe d'une certaine autonomie spirituelle face à Rome.
On peut dire que le Languedoc incarne l'identité occitane dans sa forme la plus achevée : urbaine, marchande, cultivée, et politiquement indépendante du Nord. C'est là que la poésie des troubadours atteint son apogée, que l'université de Montpellier voit le jour au 13ème siècle, que le droit romain reste vivant.
L'équilibre du Midi bascule au début du 13ème siècle. Sous prétexte de combattre l'hérésie cathare, le pape Innocent III lance une croisade contre les terres du comte de Toulouse Raymond VI. Cette guerre religieuse cache des enjeux politiques majeurs : l'expansion du royaume de France vers le sud.
Simon de Montfort mène les croisés qui ravagent le Languedoc. Le sac de Béziers en 1209, le siège de Carcassonne, la bataille de Muret en 1213 marquent une violence inouïe. Au-delà de la répression du catharisme, c'est toute une civilisation qui est mise à mal.
Le traité de Paris (1229) consacre la soumission du Languedoc. Le comte de Toulouse perd l'essentiel de ses terres. Sa fille unique épouse le frère du roi de France, préparant l'annexion définitive du comté à la couronne en 1271. Le Languedoc devient pleinement une province française, perdant son autonomie politique.
L'Héritage du Midi Médiéval
Malgré la conquête française, le Languedoc et l'Occitanie conservent leurs spécificités. Le droit romain continue de régir la propriété et les successions, contrairement au Nord où le droit coutumier règne. Les bastides, villes neuves fondées aux 13ème et 14ème siècles, témoignent d'une urbanisation qui se poursuit. La langue d'oc survit et continue d’être une langue de civilisation qui inspire, des siècles plus tard, le mouvement félibrige au 19ème siècle.
L'Occitanie médiévale, avec le Languedoc en son centre, représente une alternative à la centralisation monarchique. Cette culture brillante, ouverte et tolérante, a légué à l'Europe la poésie lyrique, un urbanisme avancé et une conception humaniste de la société. Sa mémoire demeure vivace dans l'identité des français natifs du Midi de la France. Le double héritage de l'Occitanie et du Languedoc contribuent à la grandeur de la France, tout comme les héritages breton, savoyard, corse, catalan, basque, flamand et alsacien pour en citer quelqu'uns. .